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vendredi 19 juin 2015

Entreprendre au féminin avec... Laurence d'Explorador


Organiser des chasses au trésor pour des goûters d'anniversaire, chaque parent doit faire face à cette demande un jour ou l'autre... C'est en partant de son expérience personnelle que Laurence a décidé de se lancer dans la création de cette activité.
Elle nous en parle dans l'interview qui suit.

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Bonjour Laurence,

En quelques mots, pouvez-vous nous dire qui vous êtes et quel est votre parcours ?

Je m’appelle Laurence, j’ai 45 ans, et je suis maman de 3 enfants. Il y a très longtemps (!), j’ai suivi une formation d’ingénieur en électronique, que je n’ai jamais vraiment appliquée mais qui m’a permis de travailler dans un secteur très technique. Après une formation complémentaire en marketing, je suis devenue consultante en marketing dans un secteur hyper niche : le secteur spatial. Je suis arrivée dans ce secteur qui en fait rêver plus d’un un peu par hasard, mais j’ai adoré le challenge qu’il représentait.

A quel moment avez-vous décidé de vous lancer dans la création de votre activité et pourquoi avoir fait ce choix ?

Suite au rachat de ma société par un grand groupe, j’ai été confrontée au manque de reconnaissance de mes compétences, puis licenciée de façon assez désagréable.
J’ai créé ma propre EURL en 2008 qui a plutôt bien marché les deux premières années mais ensuite, les contrats freelance se sont raréfies pour beaucoup de monde, et j’ai été contrainte de liquider après 4 ans
Par la suite, j’ai toujours eu des idées - plus ou moins faisables - de créations d’entreprises. J’ai systématiquement écarté celles qui demandaient un investissement important ou une location de locaux. En effet, je ne voulais pas faire prendre un risque financier à ma famille.
A mesure que je créais des chasses au trésor pour les anniversaires de mes enfants, que je réalisais que la plupart des parents appréhendaient le moment d’organiser la fête d’anniversaire de leur enfant, j’ai eu l’idée de vendre ces chasses au trésor. Rapidement, j’ai eu des demandes d’informations alors que mon site n’apparaissait quasiment pas sur google. J’ai donc été confortée dans l’idée que je devais persévérer et creuser dans cette direction.

coffre au trésor fini (Les idées du Samedi)
Crédit Photo http://lesideesdusamedi.fr
Comment avez-vous fait pour passer de l'idée de création au projet ?

Lors de ma précédente carrière, une grande partie de mon travail consistait à analyser la concurrence, trouver des idées novatrices pour vendre les produits et évaluer les business plans. Cette partie ne m’a donc pas posé de problèmes et j’ai simplement mis en application ce que je faisais pour les autres depuis des années.
J’ai testé l’idée auprès d’amies, et j’ai beaucoup fait tester les jeux auprès de mes enfants ! J’ai des dizaines d’idées en tête mais je n’ai pas toujours le temps de les mettre sur le papier.
Le danger est de vouloir quelque chose de trop parfait pour ne pas décevoir les enfants. Mon portefeuille est encore restreint pour cette raison ! Comme je n’ai pas de clients qui m’imposent une deadline, j’ai tendance à peaufiner, à revenir sur le fichier. Je me mets des dates butoirs mais je ne les respecte pas toujours…alors que j’étais connue pour respecter les calendriers à la lettre lorsque je travaillais pour les autres !

Avez-vous pu bénéficier d'un accompagnement par une structure pour vous aider dans vos démarches, pour choisir le statut juridique le mieux adapté en fonction de votre activité, vous informer sur les aides à la création d'entreprise pour les femmes ?

Lors de la création de mon EURL, j’étais inscrite à Pôle Emploi, et j’avais bénéficié d’une journée de formation. De par mon parcours professionnel, j’avais déjà une très bonne connaissance de l’économie d’entreprise et de ce qu’est un business plan. Je n’avais pas trouvé cette formation très utile. Les informations restaient d’ordre général et personne ne pouvait répondre à  mes questions très précises sur les différentes structures.

Pour créer Explorador, j’ai cherché l’information sur internet et je me suis rendue compte qu’on trouvait tout et n’importe quoi. Il est très difficile d’avoir des infos fiables même auprès des sources officielles qui ne connaissant pas toujours ce statut en détail. Là encore quand on pose des questions spécifiques, il faut souvent frapper à plusieurs portes avant d’avoir la réponse adéquate. Je suis actuellement auto-entrepreneur.

Lors de vos démarches, avez-vous senti qu'être une femme pouvait être un frein à la création d'entreprise ou au contraire un avantage ? Comment cela s'est-il manifesté ?

Il est difficile de savoir si les réactions sont dues au fait qu’on est une femme…

Je me rappelle que lorsque j’avais créé mon eurl pour laquelle je devais avoir un compte pro, un directeur de banque m’avait dit sur un ton paternaliste, que je devais faire un plan d’affaires agrémenté d’un  « vous savez ce que c’est ? » sans même avoir pris le temps de me demander quelle était mon activité.
Aurait-il eu la même attitude avec un homme ? Je n’ai pas demandé à mon mari de l’appeler pour voir ; je suis simplement allée dans une autre banque !

Actuellement, je pense que le fait d’être une femme pour mon activité de chasse au trésor est peut-être positif mais surtout, ce qui aide et crédibilise c’est le fait d’être parent.

Quelles sont les principales difficultés que vous avez rencontrées lors de la création de votre entreprise ?

Actuellement, je suis confrontée à des difficultés techniques. Je ne savais pas concevoir un site web, me servir de logiciels de dessins, j’ai dû me débrouiller. Je suis donc souvent confrontée  à un décalage entre mes envies et mes capacités à réaliser  et je perds pas mal de temps.

De quoi aviez-vous besoin pour vous lancer dans votre nouvelle activité ?

Ma nouvelle activité de chasses au trésor demande peu d’investissement, puisque c’est essentiellement du temps et des solutions logicielles. Par contre, je trouve intéressant de proposer aussi des petits cadeaux pour les invités ou du matériel, il a donc fallu que j’investisse un peu.

Pouvez-vous nous dire en quoi consiste cette activité ? 

J’écris sous le pseudo Lau Chasseautresor sur mon blog Les idées du Samedi, et je conçois des chasses au trésor que je commercialise sur mon site www.explorador.fr . Les chasses au trésor que je propose sont entièrement conçues autour d’un thème et d’une histoire, un peu comme un jeu de rôles. Les enfants sont transportés dans une aventure, qui les amène à résoudre des énigmes, trouver des indices, s’affronter en équipe. Comme je trouve que les cadeaux proposés dans les magasins de jouets ne répondent pas toujours aux demandes des parents et que j’aime bien laisser un souvenir aux enfants de cette fête, je commence également à proposer des petits cadeaux en lien avec le thème des chasses au trésor.

Comment faites-vous pour concilier votre activité professionnelle et votre vie personnelle ? 

Lorsque j’ai créé mon eurl, j’ai décroché mon premier gros contrat le jour de la naissance de mon troisième enfant ! J’ai fait mes déplacements, mes réunions normalement mais je travaillais beaucoup la nuit car je voulais rester disponible pour mon bébé. Ça n’a pas été facile tous les jours, mais j’ai appris à concilier les deux rapidement !
J’ai fait le choix de ne pas reprendre une activité de bureau pour être plus présente auprès de mes enfants. Dans ma vie d’avant, j’ai raté des anniversaires, j’ai été absente quand mes filles étaient très malades, j’ai raté beaucoup de couchers. C’est quelque chose que j’ai décidé de ne plus vivre.
Je fais donc en sorte d’être disponibles pour mes enfants, je les conduis aux activités, je les fais réviser lorsque nécessaire. Je travaille pas mal le soir quand les enfants sont couchés.

Quelles sont les mesures mises en place pour faciliter votre quotidien ?


Un peu d’organisation, un planning et aussi une gestion des priorités, et une assez bonne capacité à encaisser le stress ! Mon mari a des horaires chargés, il est donc peu présent.
Je sais qu’en cas d’imprévus, je peux compter sur mes amies – qui sont aussi des mamans de l’école et dont plusieurs sont en création d’entreprise également - et c’est très important. Nous nous entraidons et nous nous soutenons dans nos projets dès que c’est possible.

Quels conseils pourriez-vous donner aux femmes qui souhaitent se lancer dans la création de leur activité ?

Je pense que chaque projet est différent et qu’il est difficile de donner un conseil qui soit adaptable à toutes. Cependant, la plupart des femmes ont un complexe d’infériorité et hésitent à se lancer, multipliant les formations en ligne, les business plans, les tests et autres… Évidemment, il ne faut pas faire n’importe quoi, mais une fois que le travail préparatoire est fait, à un moment il faut sauter !
Il faut aussi un minimum de soutien de son entourage, on ne peut pas affronter les obstacles seule. Néanmoins, il ne faut pas non penser que les gens vont sauter de joie en apprenant que vous voulez créer une entreprise. Leur première réaction sera de douter, d’essayer de vous dissuader (un peu comme pour un régime en fait !).
Il faut donc croire en vous et trouver des personnes qui vous soutiendront et vous aideront pendant les coups de blues. Parlez aux mamans autour de vous, vous verrez que n’êtes pas la seule, vous pourrez vous épauler et vous aider mutuellement en échangeant vos compétences. Les blogueuses, les réseaux sociaux sont très bien aussi pour ça !

Si vous avez quelque chose à ajouter, c'est à vous !
Je trouve que le regard des autres change énormément quand on passe d’un travail de bureau à un travail à la maison, surtout quand on est une femme.
Quand un papa est à la sortie de l’école pour récupérer ses enfants, tout le monde pense que c’est super qu’il ait un boulot qui lui permette de s’organiser pour être là. Quand c’est une femme, c’est obligatoirement qu’elle n’a rien d’autre à faire…
Une connaissance de « ma vie d’avant » me demandait encore l’autre jour « et alors, quand retournes-tu dans le monde du travail ? »… Je n’essaie même plus d’expliquer : les gens ne comprenaient rien à mon travail précédent et me cataloguaient immédiatement dans les intellos à métier bizarre, maintenant, je suis cataloguée en dilettante…
A croire qu’on aime les étiquettes !

Merci Laurence pour cette interview très intéressante et pleine de bons conseils. 



1 commentaire:

  1. Bonjour, Il est passionnant cet article ! Un témoignage très intéressant, qui ne fait que confirmer ce que je ressens et je vis, non seulement il n'est pas facile de créer sa propre entreprise, mais plus encore quand on est une femme ! On "s'amuse" on ne travaille pas ... Il y a encore loin avant une vraie reconnaissance, mais nous y arriverons :)

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